Франция с 1789 года до наших дней. Сборник документов (составитель Паскаль Коши). La France contemporaine, de 1789 a nos jours. Recueil de documents (par Pascal Cauchy) — страница 13 из 35

lit.

Ce conflit était attendu avec impatience par les chefs d’insurrection restés à Paris ou accourus de province pour utiliser, au profit de leurs rêveries, la plus nombreuse force armée que jamais minorité factieuse ait eue à ses ordres. Dès la chute de l’Empire, cette minorité avait essayé de s’emparer de la garde nationale pour la faire servir à ses projets. À ces gens la guerre n’avait paru qu’un prétexte à violation du pouvoir. « Juillet 1870, dit M. Lissagaray, surprit le parti révolutionnaire dans sa période chaotique, empêtré des fruits secs de la bourgeoisie, de conspirailleurs (sic) et de vieilles goules romantiques. » La révolution du 4 septembre n’épura guère ce personnel, mais y adjoignit les orateurs des réunions publiques et les affiliés de la société sans patrie, de l’Internationale. Peu de jours après l’installation du gouvernement de la Défense nationale, l’action d’une sorte de gouvernement occulte se faisait sentir dans Paris; de prétendus conseils de famille, faisant rôle de comités de vigilance, entravaient les ordres de l’autorité, dirigeaient les élections des officiers, cherchaient à dominer dans les secteurs et formaient le groupe d’où le Comité central devait sortir en février 1871. Ce pouvoir habilement dissimulé, mais déjà très fort, ne tendait à rien moins qu’à se substituer au pouvoir accepté; celui-ci s’avisa, un peu tard, qu’il était le maître, qu’il ne devait pas se laisser systématiquement contrecarrer, et, par décret du 10 décembre 1870, il prononça la dissolution « des comités de délégués établis dans les compagnies et bataillons de la garde nationale », et rétablit les anciens conseils de famille. Sans se disperser, les groupes s’abstinrent d’une ingérence trop directe et attendirent l’occasion de reprendre l’œuvre qu’ils poursuivaient; cette occasion naquit de la force même des choses, après la capitulation de Paris.

Les hostilités étaient suspendues, tous nos forts se trouvaient en puissance de l’ennemi, les préliminaires de la paix n’avaient point encore été ratifiés; on se trouvait entre un gouvernement qui n’était plus et un gouvernement qui n’était pas encore; les administrations, ne sachant trop à qui obéir, n’osaient prendre parti dans aucune circonstance; la désagrégation était générale et l’indécision permanente.

La ville était lamentable à voir: fantassins, cavaliers démontés, marins, francs-tireurs de toute nuance, volontaires de toute couleur, gardes nationaux, gardes mobiles, vaguaient par les rues, les mains dans les poches, le fusil en bandoulière, démoralisés par l’ivresse, la défaite, et l’inaction. D’après les conventions imposées par l’Allemagne, quelques milliers d’hommes appartenant aux troupes régulières avaient été autorisés à conserver leurs armes; ceux-là on les choyait; un mot d’ordre promptement répandu parmi les gardes nationaux de Belleville, de Montmartre, de l’avenue d’Italie, avait fait comprendre qu’il fallait jouer au camarade avec eux, se les rendre favorables, parce que plus tard on aurait peut-être à lutter contre eux, et qu’il était prudent de les attirer à soi. On les menait au cabaret, dans les bons endroits; on déblatérait contre leurs généraux, on leur expliquait qu’ils avaient été trahis, et, entre deux verres d’absinthe, on leur disait: « N’est-ce pas que vous ne tirerez pas sur vos frères ? » Ils répondaient: « Jamais ! » À la journée du 18 mars, ils ont tenu parole.»

Комментарии

Maxime Du Camp – Максим Дюкан (1822–1894), французский писатель и фотограф, член Французской академии.

Gaston Crémieux – Гастон Кремьё, он же Исаак Луи Гастон (1836–1871). французский адвокат, журналист и писатель; революционер, социалист, один из лидеров Марсельской коммуны 1871 г., поддержавшей дело Парижской коммуны 1871 года. Расстрелян по приговору военного суда.

Garde f nationale – Национальная гвардия, вооруженная гражданская милиция. Была мобилизована во время франко-прусской войны, после подписания перемирия сохранила оружие.

M. Lissagaray – Проспер-Оливье Лиссагаре (1838–1901), французский литератор, журналист, социалист, убежденный сторонник республиканского строя, автор «Истории Парижской коммуны 1871 года».

Internationale f – международное товарищество рабочих, или I Интернационал (1864–1876), международная политическая организация рабочих. Учредительный манифест и устав подготовил Карл Маркс.

Gardes f pl mobiles – мобильная гвардия, вспомогательные войска, созданные в 1868 г.

19Journal officiel de la Commune, le 29 avril 1871

Le siège de Paris par les armées prussiennes a touché durement la population parisienne. A l’annonce de la paix négociée par le nouveau gouvernement issu des élections de février, Paris, refusant l’entrée des Prussiens, est en situation quasi insurrectionnelle. La garde nationale des quartiers ouvriers refuse de rendre les armes. Un gouvernement municipal s’installe avec un projet révolutionnaire très net. Durant près de trois mois, Paris est coupée du reste du pays. La Commune entreprend des réformes sociales ambitieuses mais aussi une répression sanglante qui touche, entre autres, le clergé. En mai, le gouvernement, installé à Versailles, organise la reconquête militaire de Paris qui durera une semaine. Plusieurs immeubles sont brûlés par les insurgés dont le château des Tuileries. La répression qui suit sera particulièrement sévère et éteindra le ferment révolutionnaire parisien. Karl Marx aura des mots très durs pour les dirigeants de la Commune qu’il accuse d’impréparation et d’indiscipline politique.

« DÉCLARATION AU PEUPLE FRANÇAIS

Dans le conflit douloureux qui impose une fois encore à Paris les horreurs du siège et du bombardement, qui fait couler le sang français, qui fait périr nos frères, nos femmes, nos enfants écrasés sous les obus et la mitraille, il est nécessaire que l’opinion publique ne soit pas divisée, que la conscience nationale ne soit point troublée.

Il faut que Paris et le pays tout entier sachent quelle est la nature, la raison, le but de la Révolution qui s’accomplit. Il faut enfin que la responsabilité des deuils, des souffrances et des malheurs dont nous sommes les victimes retombe sur ceux qui, après avoir trahi la France et livré Paris à l’étranger, poursuivent avec une aveugle et cruelle obstination la ruine de la capitale, afin d’enterrer, dans le désastre de la République et de la Liberté, le double témoignage de leur trahison et de leur crime.

La Commune a le devoir d’affirmer et de déterminer les aspirations et les vœux de la population de Paris; de préciser le caractère du mouvement du 18 mars, incompris, inconnu et calomnié par les hommes politiques qui siègent à Versailles.

Cette fois encore, Paris travaille et souffre pour la France entière, dont il prépare par ses combats et ses sacrifices, la régénération intellectuelle, morale, administrative et économique, la gloire et la prospérité.

Que demande-t-il ?

La reconnaissance et la consolidation de la République, seule forme de gouvernement compatible avec les droits du peuple et le développement régulier et libre de la société.

L’autonomie absolue de la Commune étendue à toutes les localités de la France, et assurant à chacune l’intégralité de ses droits, et à tout Français le plein exercice de ses facultés et de ses aptitudes, comme homme, citoyen et travailleur.

L’autonomie de la Commune n’aura pour limites que le droit d’autonomie égal pour toutes les autres communes adhérentes au contrat, dont l’association doit assurer l’unité française.

Les droits inhérents à la Commune sont:

Le vote du budget communal, recettes et dépenses; la fixation et la répartition de l’impôt; la direction des services locaux; l’organisation de sa magistrature, de la police intérieure et de l’enseignement; l’administration des biens appartenant à la Commune.

Le choix par l’élection ou le concours, avec la responsabilité, et le droit permanent de contrôle et de révocation des magistrats ou fonctionnaires communaux de tous ordres.

La garantie absolue de la liberté individuelle, de la liberté de conscience et la liberté du travail.

L’intervention permanente des citoyens dans les affaires communales par la libre manifestation de leurs idées, la libre défense de leurs intérêts: garanties données à ces manifestations par la Commune, seule chargée de surveiller et d’assurer le libre et juste exercice du droit de réunion et de publicité.

L’organisation et la défense urbaine de la garde nationale, qui élit ses chefs et veille seule au maintien de l’ordre dans la cité.

Paris ne veut rien de plus à titre de garanties locales, à condition, bien entendu, de retrouver dans la grande administration centrale, délégation des communes fédérées, la réalisation et la pratique des mêmes principes.

Mais, à la faveur de son autonomie et profitant de sa liberté d’action, Paris se réserve d’opérer comme il l’entendra, chez lui, les réformes administratives et économiques que réclame sa population de créer des institutions propres à développer et propager l’instruction, la production, l’échange et le crédit; à universaliser le pouvoir et la propriété suivant les nécessités du moment, le vœu des intéressés et les données fournies par l’expérience.

Nos ennemis se trompent ou trompent le pays quand ils accusent Paris de vouloir imposer sa volonté ou sa supériorité au reste de la nation, et de prétendre à une dictature qui serait un véritable attentat contre l’indépendance et la souveraineté des autres communes.

Ils se trompent ou trompent le pays quand ils accusent Paris de poursuivre la destruction de l’unité française, constituée par la Révolution, aux acclamations de nos pères, accourus à la fête de la Fédération de tous les points de la vieille France.

L’unité, telle qu’elle nous a été imposée jusqu’à ce jour par l’empire, la monarchie et le parlementarisme, n’est que la centralisation despotique, inintelligente, arbitraire et onéreuse.